Communication: un message portant à confusion
En refusant d’être lié au phénomène en plein boom qu’est le coworking, le HUB (au niveau global) est non seulement en train de manquer une réelle opportunité pour sa visibilité, mais délivre aussi un message confus sur ce que l’on peut attendre des Hubs locaux. Un certain nombre de personnes n’ont eu de cesse de me demander ce qu’était le HUB même si ils avaient auparavant visité le site. De plus, le focus sur les entrepreneurs sociaux créa une sorte de mur entre le HUB Brussels et un certain nombre de personnes intéressantes, qui ne se définissaient pas nécessairement elles-mêmes comme des entrepreneurs sociaux.
Cette ségrégation dans le langage et dans la pratique créa une sorte de flou quant à l’identité de la communauté, sur qui est le bienvenu et sur qui ne l’est pas. Si le but du HUB Brussels était de créer un espace pour innovateurs sociaux, il était légitime de se demander: combien parmi la communauté étaient vraiment des innovateurs sociaux?
Au lieu de trop se concentrer sur le langage, le HUB en tant qu’organisation, a besoin d’agir sur ses valeurs, non seulement pour attirer des personnes partageant les mêmes intérêts mais aussi pour influencer positivement toutes les parties prenantes, qui ne sont pas des innovateurs sociaux. Un espace de coworking est un écosystème composé de talents multiples et doit être ouvert à tous ceux qui trouveront de la valeur dans l’espace et dans la communauté. L’identité de la communauté prend forme lorsque ceux qui l’accueillent agissent selon leurs valeurs.
Pour illustrer mon propos précédent. Il est très intéressant de prendre le HUB Melbourne comme contre-exemple. Le HUB Melbourne fut créé en 2011 et porte aujourd’hui une communauté de 700 membres. Voilà comment son fondateur Brad Krauskopf l’a expliqué pendant la conférence européenne de 2012. Ainsi, le Hub Melbourne déclare clairement qu’IL EST un espace de coworking et construit son image autour du coworking, de l’apprentissage et de la mise en relation. Pour mémoire, mise à part moi-même, Brad était la seule personne impliquée dans un HUB ayant été présente lors de la conférence Européenne du coworking...
L’essentiel: loin des yeux, loin du cœur
Alex, l’un des cofondateurs du HUB, déclara à l'une des réunions de coopérateurs pendant laquelle fut décidé la fermeture du HUB Brussels que «les membres fondateurs n’auraient sans doute pas dû créer une coopérative au lieu d’une association». Il ajouta que le HUB Brussels n’avait jamais vraiment été réellement considéré et géré comme une entreprise, alors qu’il avait les contraintes d’une entreprise sans même avoir les avantages d’une association. J’estime cette affirmation très proche de la réalité, à partir du moment où j’ai moi-même ressenti un mauvais équilibre entre l’aspect économique du HUB et l’offre de l’organisation.
Il y avait une confusion entre le concept d’entreprise sociale devant être économiquement durable et un espace géré par la communauté soutenu par des financements externes (donations, subventions publiques), comme les sont les hackerspaces ou même les bibliothèques.
Les fondateurs/managers n’ont eu pendant longtemps de cesse de chercher la flexibilité à tout prix et ce tout en perdant de vue l’essentiel. Lorsque j’ai rejoint le HUB and Janvier 2011, j’avais été frappé par le nombre de services gratuits, surtout pour les personnes venant de l’extérieur.
Aucune marge n’était faite sur la restauration, les pauses café étaient gratuites et le prix de la location des salles était plutôt bas. En procédant à quelques ajustements sur l’offre et les prix (entres autres), les revenus annuels de l’activité évènementielle avait doublé.
D’autre part, il y avait trop d’adhésions différentes à choisir. J’ai pu observer que nombre de membres qui avaient au départ choisi l’offre la plus importante, réduisaient progressivement leur niveau d’adhésion jusqu’à atteindre le niveau le plus bas (HUB connect) n’offrant aucun accès à l’espace de travail. Puis ils partaient. Une autre statistique à prendre en compte était le nombre de membres par type d’adhésion: la plupart des membres de la communauté utilisaient le forfait HUB connect ou avaient une adhésion offrant une faible utilisation de l’espace de travail. Avec un tel modèle, il était très difficile d’avoir une communauté stable, dès lors que les gens ne faisaient que passer sans renforcer le cœur de la communauté, ce qui n’attirait pas les créateurs: ceux qui ont besoin d’espace pour travailler, lancer des projets et donc permettre de nouvelles collaborations.
Gouvernance et leadership: qui veut la patate chaude?
En matière de gestion, l’un des principaux problèmes était que les preneurs de décisions étaient déconnectés de la réalité quotidienne du HUB Brussels. Les décisions étaient prises entre le conseil d’administration et l’équipe de managers, laissant des zones d’ombres dans l’ensemble du processus et conduisant inévitablement à une perte d’énergie. Le HUB Brussels étaient souvent appelé par les membres du management le «siphon à énergie». Nous savions que le problème était justement ce décalage entre le pouvoir de décision et la responsabilité qui en découle, mais aucune solution efficace n’avait pu être trouvée à temps.
Une entreprise comme le HUB a besoin d’être soutenue par les mêmes personnes croyant à la nécessité de son existence, de son impact et des valeurs. Elles ont besoin de régulièrement mettre leurs mains dans le cambouis pour régler chaque problème et renforcer la communauté. Dans le cas du HUB Brussels, les cofondateurs ont délaissé la gestion quotidienne et se sont retrouvés sans énergie pour poursuivre l’aventure du HUB, ou ont simplement quitté Bruxelles ou la Belgique. Quand il fut finalement de temps de décider de transférer le pouvoir de décision à une nouvelle équipe, le trou financier était trop important à résorber. Le processus pour identifier une nouvelle équipe était hésitant, long (une année), faisant des déçus parmi les membres engagés, alors que cela aurait même pu être une occasion de renforcer le noyau dur de la communauté.